17 octobre 2012

bloub bloub bloub

Cher lecteur, en direct de mon sous-marin dans lequel j'essaie de surnager...

La semaine dernière s'est déroulée dans une sorte de brouillard. Dimanche, hôpital avec Cédric, nuit de veille avant l'opération, révisions et devoirs à la lueur de la veilleuse pendant que mon lardon dort et prend des forces pour ce qui l'attend...
Je ne peux que mesurer ma chance d'avoir un fils extraordinaire qui vit les épreuves avec tant de force et surtout une capacité à prendre sur lui juste confondante. Moi je suis là, à me ronger les sang et à ne pas dormir. Lui qui n'est plus pourtant dans la petite enfance inconsciente, qui sait d'autant plus ce qui l'attend que c'est la 8e fois qu'il traverse cette épreuve, dort à poing fermé, intériorise sa peur, économise ses force, et me dit d'ailleurs avant de se coucher "il faut que je passe une bonne nuit car c'est fatiguant pour le corps, une opération, il vaut mieux qu'il soit reposé!"
6H du matin, il fait nuit noire, une infirmière ouvre la porte, me fait signe, propose un jus de pomme à Cédric. Mon corps est comme scotché à mon matelas, mon dieu qu'il est lourd! Je me lève, un bisou : réveille toi mon poussin, il faut prendre ta douche à la bétadine... Cédric me dit que son ventre a peur, mais que lui n'a pas peur, il sait que tout va bien se passer. Il cherche une approbation dans mon regard, que je m'efforce de lui donner.

6H30 Il est lavé, dans son lit, me sourit, il attend... Une infirmière vient lui poser les patchs emla pour les perfusions. 7H30 c'est déjà l'heure du branle-bas de combat. On descend au bloc, j'ai le droit d'accompagner mon loulou. Il est médiqué et somnolent, pas vraiment stressé, pas vraiment rassuré. La chimie fait son oeuvre pour lui et étouffe l'expression d'un quelconque sentiment.
8H, le bloc est prêt, je reste derrière la limite des locaux qui me sont autorisés. Le lit s'en va, mon poussin avec lui, emportant ma dernière étreinte.
Jérémie est arrivé, nous prenons 5 minutes pour boire un café, passer le relais, les infos. Pour la première fois, j'ai le sentiment que nous sommes deux à gérer cette aventure. Je pense que jusqu'ici je n'ai pas laissé de place dans ma tête à Jérémie à l'hôpital avec Cédric. Ce matin là, tous les deux au relais H au milieu des blouses blanches qui partent et arrivent, nous sommes sur la même longueur d'onde, nous parlons la même langue, je déverse en lui comme dans un réceptacle les infos nécessaires, les sentiments induits, ressentis, il les reçoit simplement. C'est déjà l'heure. Un enlacement fugace et nous repartons déjà chacun de notre côté. Les lumières de l'hôpital restent derrière moi et je m'engouffre dans la foule du métro. Retour à l'IRTS. Je dois laisser loin dans mon coeur les images de mon fils, de son père, et de ma fille aussi qui est une fois de plus obligée de rester à l'écart.
A l'IRTS je suis immédiatement plongée dans une autre dimension. L'atelier a déjà commencé, nous devons concevoir une affiche à partir de nos conceptions des métiers du travail social. Le travail avec ce groupe me paraît sur le moment pénible, fastidieux, je me sens contrariée, pas écoutée, pas en accord avec ce qui est représenté et dit. J'ai l'impression de ne pas pouvoir exprimer mes opinions parce qu'elles sont reçues comme des critiques.
Je me rends compte en écrivant ce billet à quel point mon état d'esprit en arrivant devait y être pour quelque chose, combien ce que j'étais entrain de vivre pouvait influencer mon comportement et la façon dont je vivais l'atelier. J'ai sans doute été plus agressive que je ne l'ai perçu, d'où cette impression d'être entourée de gens qui ne m'écoutaient ni ne me comprenait. Je me suis demandée si je parlais la même langue. Vraisemblablement non, mais c'était de mon fait.
La semaine s'est passée en aller/retours hôpital/IRTS, mes souvenirs sont confus, je me suis sentie absurdement fière de ne pas m'écrouler et de parvenir à travailler à l'hôpital.
En réalité, j'ai pris énormément de retard dans mon travail et aussi dans mon "capital décompression" si tu vois ce que je veux dire, cher lecteur... Résultat, ce début de semaine a été un peu difficile nerveusement pour moi.
Cependant pour l'instant mes résultats se maintiennent puisque notre 2e note de travail de groupe en science politique est aussi bonne que la première, c'est encourageant!

Hier, nous avons eu une matinée autour du récit de formation, vraiment intéressante. Ecouter des travailleurs sociaux parler avec passion de leur métiers donne une petite piqûre de rappel sur le pourquoi on se farcit tous ces cours de fac, ça aide à tenir un peu le coup, et ça donne envie surtout...
J'ai beaucoup aimé entendre les profs nous dire, citations à l'appui, que l'écriture n'était pas un processus de retranscription d'une réflexion, mais plutôt l'inverse...
On m'a reproché toute ma scolarité d'écrire spontanément  Ces reproches n'étaient pas infondés, c'est vrai que je manquais de rigueur et de méthodes, que les plans sont utiles et l'organisation de la pensée aussi. Mais je ne comprenais pas pourquoi je n'arrivais pas à travailler comme on me le demandais, et comment j'arrivais pourtant à obtenir de bons résultats.
Avec le temps, j'ai appris à écouter les critiques, et à poser un cadre à ma pensée avant de me lancer. Je comprends aujourd'hui que ma façon de travailler n'était pas si anormale que ça, et que sans doute l'alliance de l'écriture spontanée et la réflexion préalable mais surtout suivant l'écriture peut beaucoup m'apporter. "Ecrire, c'est penser avec sa main" a dit Cyrulnik , c'est exactement ma façon de fonctionner.

Mon grand lardon va bien. Il est sorti de l'hôpital Mercredi soir, a passé quelques jours de convalescence chez ses mamies respectives et à la maison, et a retrouvé le chemin de l'école hier. La douleur a été plus importante que prévue, puisque le chirurgien lui avait garanti qu'il n'aurait pas mal du tout (très malin...) mais Cédric l'a très bien géré... Elle s'estompe peu à peu, et son nez commence à dégonfler. Nous avons hâte que ses fils se résorbent et qu'on lui retire ses conformateurs racinaires pour qu'il puisse enfin profiter de son nouveau confort respiratoire...
Nous voyons son chirurgien mardi...

2 commentaires:

Gaëlle a dit…

J'espère que vous allez bien. J'ai parcouru votre blog en entier il y a bien un an (en sous marin). Je viens d'avoir un bébé qui a une toute petite déformation de rien du tout (pieds supinatus), et en recherchant un peu là-dessus, j'ai pensé à Cédric.

Poursuivez votre petit bonhomme de chemin, j'aimais bien vous lire.

Amitiés

Gaëlle a dit…

Bonsoir. Je repasse par ici. je ne sais pas comment, j'ai pensé à vous. J'espère que tout va bien pour vous.