19 octobre 2010

Au revoir, mon amie...

Parce que je ne peux pas ne pas écrire sur elle, parce que le temps passe sans que la peine s'allège, parce que je ne peux pas reculer éternellement...

Je dois dire ici aurevoir à Catherine.

La laisser s'en aller.

J'ai du mal encore à accepter, je dois dire. Comme si ça changeait quelque chose à la réalité...
Elle est partie.
Partie.
Plus là.
Plus de rires, plus son sourire. Plus son regard bleu perçant. Plus ses si longs cheveux blonds. Plus la canule qui modifiait sa voix. Plus son oreille attentive. Plus ses mots pertinent et impertinents. Plus sa complicité avec Cédric. Plus de "tata connerie". Plus de froncements de sourcils quand elle faisait manger ses chiens à table. Plus de promenade au château en poussant le fauteuil. Plus son numéro à appeler pour échanger des nouvelles, ragoter, raconter nos malheurs. Plus ces petits secrets rien qu'à nous. Plus ses cadeaux à gogo pour les enfants. Plus cette générosité exubérante et discrète à la fois. Plus cette souffrance silencieuse, tapie au coin de ses yeux. Plus ce changement d'humeur qui annonçait sa limite physique. Plus cette raideur qui la gagnait toujours plus. Plus cette peur de l'avenir : que va-t-il se passer? Plus peur de la contaminer avec nos microbes.
Plus de tata Catherine. Plus ma belle soeur. Plus mon amie...

Tu me manque Catherine, tu me manque tellement, tu me manque tous les jours... Tous les jours je pense à toi... Tous les jours j'ai envie de pousser des cris de désespoirs parce que je ne peux plus composer ton numéro sur mon portable pour te dire toutes ces choses que je n'ai pas eu le temps de te dire.

J'ai sur le coeur ce gros poids, cette grosse peine, cette grosse semaine moi sans toi et toi sans moi, où j'aurai voulu, où j'aurai dû être là pour te tenir la main, te réconforter, t'accompagner dans la douleur, même si tu n'étais plus dans la réalité. Ma Catherine si petite sous cette énorme peur, cette énorme douleur, cette énorme maladie qui t'écrasait sans te laisser aucune chance. Ma Catherine si grande dans ta dignité, ta gentillesse, ta maturité face aux épreuves. Tu m'as tellement appris, tellement donné, tellement apporté. Tellement partagé.
Je sais bien, je SAIS que tu n'aurai pas voulu que je te vois comme ça. Qu'il n'y avait rien de pire au monde pour toi, rien, qu'un regard apitoyé, que la preuve de ta faiblesse et de ta souffrance. Je sais que ce n'est pas forcément ce que tu aurai voulu. Mais je sais que tu en aurai eu besoin. Et je sais aussi ce lien entre nous, je sais que tu aurai accepté ma main tendue si je te l'avais tendue. Si j'avais su qu'il ne restait plus de temps. Si j'avais su que l'urgence n'était plus de te préserver de nos microbes, mais de t'accompagner, de ne pas te laisser seule et terrifiée dans cet hôpital.

Je n'ai rien pu faire. C'était trop tard. Le téléphone a sonné, et c'était fini. Et une semaine après encore seulement, je ne pouvais plus reculer pour te dire aurevoir. Te voir une dernière fois. Constater ce que mon esprit refusait d'admettre. C'était bien toi, ton corps, ton visage. C'étaient un corps et un visage morts. Tu étais partie. Et c'était injuste et dégueulasse. La vie n'avait pas le droit de te faire tout ce qu'elle t'a fait. Elle n'avait pas le droit de t'emporter de cette façon là...
J'en suis toujours à la colère. Je sais, il paraît que ça passera. Qu'ensuite je ne serai plus que triste. Je le suis déjà infiniment. La vie a perdu sa saveur, ses couleurs, son sens. Ca sers à quoi sans toi, dis moi?
Alors oui, la vie continue. On va continuer d'avancer un pied devant l'autre, et de construire des choses, des projets, de sourire et de rire, d'aimer nos enfants, et on fleurira ta tombe... Mais rien ne sera plus jamais comme avant maintenant.

J'espère qu'il existe un lieu, un temps, où l'on se retrouvera. Où je pourrai t'étreindre une dernière fois, te donner tout l'amour que je te porte et qui me fait mal chaque jours qui passe.