04 octobre 2009

réflexions en vrac sur mes enfants et ma relation avec eux...

Elle a les traits fins. La peau de pêche. Elle est douce et calme. Déterminée aussi. Elle a les cheveux frisés de la famille, qui seront plus tard autant fierté que calamité. Ses yeux sont deux billes bleues, mobiles et expressives, déjà emplies d'intelligence. Sa bouche est pleine, ourlée, délicate, comme des pétales de fleur. Ses sourires sont des cadeaux. Ses rires des trésors. Son front, ses sourcils, et la forme générale de son visage empruntent plus à son père. Elle est fine, petite, et pleine de rondeurs. Elle est tonique et souple, tout son corps s'exprime quand elle est dans l'échange. Elle a le sommeil léger mais confiant. Elle aime son lit, le notre, celui de son frère, et le canapé. Elle dort moins facilement dans son transat, comme une souche dans l'écharpe. Elle est câline et aime enfouir son visage dans ma poitrine, attraper mes doigts, les étirer, les porter à sa bouche et à son visage, guider mes caresses sur ses joues, son cou, ses cheveux. Elle aime tendre à son tour ses petites mains potelées vers moi, attraper mon nez, ma bouche, les caresser. Elle est douce, attentive dans ses gestes. Elle commence à sucer son pouce et tire satisfaction de ce petit exploit. Elle attrape ses genoux dans son bain, le fait de façon très concentrée. Elle cherche maintenant à viser ses pieds. Elle joue avec ses jouets suspendus, adore sa poupée. Elle joue avec son hochet, et aime s'en servir pour atteindre les jouets qui sont trop loin de ses mains. Elle se redresse avec force, comme si elle cherchait à s'asseoir, depuis ses un mois. Elle fait ça quand elle cherche sa tétine. Elle joue à retirer sa tétine de sa bouche, à la retourner dans ses mains puis à la remettre. Elle a mis du temps à babiller, pendant 3 mois elle ne prononçait aucun son, et puis c'est venu un jour. Elle babille fort et sérieusement. Très concentrée sur les sons qu'elle produit, elle prend plaisir à moduler sa voix, à faire courir l'air dans les différentes zones de sa bouche et de son nez, à introduire ses doigts ou bouger sa langue pour observer les effets. Elle aime couvrir le son de ma voix et celle de son frère en babillant plus fort. Elle sourit dès qu'elle voit son frère, et son regard pétille avec intensité. Depuis hier, elle a des éclats de rire qui sont de purs bonheur. Elle accroche le regard quand elle communique, rit ou sourit, à tel point qu'il est difficile de s'en détacher.

Dimanche, 8H30 du matin. La nuit a été courte, je me suis couchée trop tard. Je m'échine à introduire la tétine dans l'œil de Camille avant de réaliser que sa bouche est plus bas. Cela va-t-il suffire à la rendormir? Je n'attend pas de le savoir et m'écroule dans mon lit, j'ai mal au dos.
De vigoureux babillements s'envolent du petit lit. Je soupire et me résigne à ce que la journée commence. Mais j'ai le sourire, chaque fois que je l'entend. C'est de la fatigue, oui, mais c'est du plaisir surtout. C'est du plaisir tout le temps! C'est du plaisir quand je change ses fesses sales en fesses propres. C'est du plaisir quand il faut la soigner, la laver, l'habiller, la nourrir, la bercer, la consoler, lui parler, la faire jouer. La regarder dormir. C'est du plaisir sans arrêt. Les moments où j'ai ressenti une pointe d'agacement, depuis son premier mois, sont très rares.

Ce plaisir, ces journées qui s'enchainent trop vite, filent entre mes doigts, ces progrès constants qu'on a à peine le temps d'apprécier, me renvoient les images d'une autre période, que j'aimerai chasser négligemment de mon esprit en me disant "plus tard...". Mais non, je n'ai pas le droit de remettre ça à plus tard, de me vautrer égoïstement dans la pure osmose de ma relation mère-fille, car j'ai aussi une relation mère-fils à entretenir, et une relation femme-homme qui ne doit pas non plus être négligée.

Il est blond et frisé. Le visage bien dessiné. Doux, enfantin, avec une ébauche de caractère dans les angles de la mâchoire qui me rappellent comme il grandit. Il a les yeux d'un vert extraordinaire, mélange de bleu, de jaune, de verts, qui font écho à ses cheveux. Il a le regard doux, parfois espiègle, le plus souvent empreint de gentillesse. Il a mon nez large, un peu dévié, une cicatrice en "Z" à peine visible court sous sa narine et traverse sa lèvre. Ses dents du haut sont un peu vagabondes, celles du bas plus droites. Une incisive a rejoint la collection de la petite souris. Il a mon front court et la forme de mes oreilles. Le caractère déterminé, parfois obstiné, de son père. Il est "brillant" aux dires de ses tata, curieux de tout, presque obsessionnel dans son désir de comprendre le monde et ses mystères. Il a la soif insatiable de connaissances propre à son âge. Il est en admiration totale pour tout ce que fait son père. Il aime la musique, se faire beau, les chaussures "qui vont vite" et l'informatique. Il aime parler tout le temps, de tout, à tort et à travers. Il aime s'écouter, à tel point qu'il s'enregistre et se passe sa voix en boucle pendant des heures. Il me dit qu'il m'aime, qu'il aime son père, sa soeur, et qu'il s'aime très fort lui aussi. Il n'aime pas les limites qu'on lui impose, ne pas se sentir l'égal des adultes, de pas être écouté, entendu. Il aime sa kiné, mais n'aime pas être contraint à y aller. Il est farceur, provocateur, il a de la suite dans les idées. Il aime être avec les adultes, déteste jouer seul dans sa chambre. Il voudrait qu'on invite sa maitresse à dormir. Il se couche et se lève avec le sourire.

C'était un bébé tout rond, charmeur, souriant, facile. Un bébé qui s'adaptait de tout, partout, ne se plaignait jamais. Un bébé qui n'avait de cesse de créer le lien avec sa maman qui ne lui renvoyait que doutes et angoisses. Je me souviens la peur constante, dès que je croisais son regard, son petit corps plein de besoins que je craignait ne pas savoir combler. La répugnance qui me saisissait à introduire dans sa bouche la tétine du biberon et à regarder interminablement le lait qui semblait ne jamais se vider.
Je me souviens comme je le trouvais beau, comme je ne me lassais pas de m'émerveiller de tout son corps : ses mains, son bidon tout rond, ses cuisses dodues, son visage...
Je me souviens comme j'avais la sensation de ne plus exister, de ne plus avoir le temps de rien, et la recherche éperdue d'un sommeil qui semblait toujours me manquer. Dormir était une obsession, une crainte, un besoin jamais assouvi. Pourtant Cédric a fait ses nuits tôt, de plus en plus longues. A 7 mois il pouvait dormir allègrement 15h d'affilée et refaire une sieste ensuite. Il se réveillait rarement la nuit, mais jusqu'à récemment cette seule idée me paniquait. Je me souviens les trajets quotidiens interminables pour aller chez le kiné. Sous le soleil de plomb ou la pluie diluvienne de l'été. 3km aller, autant au retour. Côte à côte son père et moi, un peu abasourdis, choqués, mais découvrait aussi peu à peu le plaisir d'être ensemble dans un but commun. Je me souviens que Cédric adorait les cahots de la route qui le berçaient. Nous prenions garde à n'emprunter que les ornières, les cailloux, les bords de trottoir...

J'essaie de ne pas trop penser à ma différence de relation avec Cédric bébé et avec Camille bébé. Je suis contente de m'être extirpée de cette période d'effroi sans nom qui a suivi la naissance de Camille et qui au moins sur ce point rejoignait parfaitement ce que j'ai ressenti à la naissance de Cédric. Je suis contente de n'avoir pas réprimé par réflexe mon penchant naturel à fusionner avec ma fille, à l'opposé de ma réaction de recul face à cédric bébé, à qui j'avais trop peur de faire du mal, pour ne pas léser l'un par rapport à l'autre. Il est illusoire de croire qu'on peut élever deux enfants de la même façon, ni de façon égale. Je sais une chose en tous cas, c'est que j'ai donné mon maximum à Cédric, le maximum que je pouvais donner, avec les moyens, les connaissances, et le mental que j'avais à l'époque, et que je donnerai le maximum à Camille, avec les moyens qui sont miens aujourd'hui. Si je suis plus à l'aise aujourd'hui que naguère, si je fusionne comme si j'avais fait ça toute ma vie, j'ai aussi moins de temps, plus d'impératifs, je laisse passer d'autres choses, j'ai moins le temps et l'énergie pour les rituels, les jalons que j'ai tant veillé à poser pour Cédric et qui ont porté leurs fruits. C'est vrai que je n'ai pas fusionné physiquement avec Cédric, mais j'ai fusionné par le coeur, ça je le sais et je le vois encore aujourd'hui. Je pense à nos "aventures", comme Cédric les appelle. Nos escapades tous les deux, le vif plaisir que nous y avons pris, ce temps qui n'était consacré qu'à lui, où nous découvrions, devisions, bavardions. Je n'aurai jamais cette relation exclusive avec ma fille, qui devra toujours la partager avec Cédric. Finalement je suis contente que ce soit à ce point différent entre mes deux enfants, différents dans l'expérience et les choix, mais pas différent dans l'amour puissant et surtout naturel qui les imprègne. Je n'essaie pas d'être autrement que je suis. Je crois que définitivement, l'éducation que je donne, l'amour que je porte, seront toujours avant tout autre chose, empreints d'honnêteté et de respect. C'est ma règle de base : respecter l'autre, son intimité, sa personnalité, se respecter soi, respecter ses propres besoins, ne pas se sacrifier, se dissoudre dans sa maternité, pour ne pas être toute puissante, être soi, se respecter soi, c'est aussi donner l'exemple, et c'est ce qui fait qu'ensuite l'enfant se respecte lui même et respecte l'autre.

C'est ce qui fait qu'un petit bonhomme de 5 ans vous dit que quand il sera mort, certes, et c'est dommage, le monde ne cessera pas de tourner (il aurait bien voulu mais bon j'ai du le détromper), mais les gens le pleureront sur toute la surface du globe, assisteront à ses funérailles, et bâtiront une statue à son effigie!
C'est aussi ce qui fait que ce même petit bonhomme est capable de vous dire, même quand vous le terrifiez par votre colère de maman-pas-contente que lui aussi il est fâché, que lui aussi a des sentiments, et qu'il avait ses raisons de faire ses bêtises.
C'est ce qui fait également qu'il commence souvent sa journée par me demander comment je vais, comment j'ai dormi, et qu'il la termine en me souhaitant de beaux rêves et en me disant qu'il m'aime.

Je ne doute pas, je n'ai jamais douté je crois. J'ai douté de mes methodes, certes, j'ai douté de mes choix, je les ai remis en cause tout le temps, mais je n'ai jamais douté que je sois une bonne maman. Sans prétention aucune. Mais je ne doute pas que je leur donne le meilleur à chaque instant, un meilleur qui change à chaque instant, et qui au lieu de me rappeler que je suis imparfaite, me rassure sur le fait que je ne m'entête pas dans l'erreur, et ça, c'est le pire danger que je combat. Faire à la mesure du jour, à la mesure de l'enfant, à la mesure de soi. C'est ma recette.


7 commentaires:

barbaracadabra a dit…

tres joli blog ! avec du recul,tout parait plus clair!

gigi a dit…

ben dis donc, tu n'écris plus très souvent, mais quand tu le fais, quel beau chant d'amour!!!!
Un jour, Cédric m'a dit" maintenant qu'il y a Camille, on est une famille". Comme il a raison! et quelle famille sereine vous formez. Très belle analyse de ce rôle si difficile de maman!!!!

gigi a dit…

ben dis donc, tu n'écris plus très souvent, mais quand tu le fais, quel beau chant d'amour!!!!
Un jour, Cédric m'a dit" maintenant qu'il y a Camille, on est une famille". Comme il a raison! et quelle famille sereine vous formez. Très belle analyse de ce rôle si difficile de maman!!!!

Aurore a dit…

On ne peut pas nier qu'ils sont frères et soeurs ces deux là ... Ni qu'ils sont de vous :)
Très bel article , on y sent tout l'amour que tu portes à tes bouts de chous ( plus si petit que ça le Cédric d'ailleurs :) ) .
Je t'embrasse très fort et j'espère te recroiser bientôt sur meusmeuneu :)

Anonyme a dit…

c'est beau.
tu écris vraiment tres bien

kanou

Claude-Lise a dit…

bravo pour ce texte très émouvant. Et tu es resplendissante sur la photo:)

Sandrine (Tilelo) a dit…

Alors là !!!!!!!!! Je peux pas dire que je sois bluffée parce que ça m'etonne pas de toi ,mais ce blog est magnifique ,ton dernier texte ,il est juste M A G N I F I Q U E ! Vraiment !! Tes enfants peuvent etre fiere de leur mamounette !